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Category: Extraits et citations

Pour arrêter la catastrophe d’un crépuscule du soir

Pour arrêter la catastrophe d’un crépuscule du soir

Courbet a eu recours aux forêts inconcevables. Son œil ne tenait pas sur les jardins mignards. À peine assis, la barrière le gêne, il s’arrache au pliant, renverse les guéridons, calte, dévale tout le chemin jusqu’au gros chêne, gicle et fuse parmi les blés, paumes ouvertes sur la barbe d’épis, doigts écartés dans la fourrure rêche, qui le gratte, l’irrite, l’échauffe; il plonge à la première eau, flaque ou nuage noir. Il lui fallait incorporer la nature – boire, dévorer…

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Une main

Une main

Chez un sculpteur, moulée en plâtre, J’ai vu l’autre jour une main D’Aspasie ou de Cléopâtre, Pur fragment d’un chef-d’oeuvre humain;  Sous le baiser neigeux saisie Comme un lis par l’aube argenté, Comme une blanche poésie S’épanouissait sa beauté.  Dans l’éclat de sa pâleur mate Elle étalait sur le velours Son élégance délicate Et ses doigts fins aux anneaux lourds.  Une cambrure florentine, Avec un bel air de fierté, Faisait, en ligne serpentine, Onduler son pouce écarté.  A-t-elle joué dans les boucles Des cheveux lustrés de don Juan, Ou sur son caftan d’escarboucles Peigné la…

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Le Phénix…

Le Phénix…

Toutes les choses au hasardTous les mots dits sans y penserEt qui sont pris comme ils sont ditsEt nul n’y perd et nul n’y gagne Les sentiments à la dériveEt l’effort le plus quotidienLe vague souvenir des songesL’avenir en butte à demain Les mots coincés dans un enferDe roues usées de lignes mortesLes choses grises et semblablesLes hommes tournant dans le vent Muscles voyants squelette intimeEt la vapeur des sentimentsLe coeur réglé comme un cercueilLes espoirs réduits à néant Tu es venue l’après-midi crevait la terreEt la terre et les hommes ont changé de sensEt je me suis trouvé réglé comme un aimantRéglé comme une vigne A l’infini notre chemin le but des autresDes abeilles volaient futures de leur mielEt j’ai multiplié mes désirs de lumièrePour en comprendre la raison Tu es venue j’étais très triste j’ai dit ouiC’est à partir de toi que j’ai dit oui au mondePetite fille je t’aimais comme un garconNe peut aimer que son enfance Avec la force d’un passé très loin très purAvec le feu d’une chanson sans fausse noteLa pierre intacte et le courant furtif du sangDans la gorge et les lèvres Tu es venue le voeu de vivre avait un corpsIl creusait la nuit lourde il caressait les ombresPour dissoudre leur boue et fondre leurs glaconsComme un oeil qui voit clair L’herbe fine figeait le vol des hirondellesEt l’automne pesait dans le sac des ténèbresTu es venue les rives libéraient le fleuvePour le mener jusqu’à la mer Tu es venue plus haute au fond de ma douleurQue l’arbre séparé de la forêt sans airEt le cri du chagrin du doute s’est briséDevant le jour de notre amour Gloire l’ombre et la honte ont cédé au soleil Le poids s’est allégé le fardeau s’est fait rire Gloire le souterrain est devenu sommet La misère s’est effacée La place d’habitude où…

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Le hasard des rencontres, la forme d’une ville

Le hasard des rencontres, la forme d’une ville

il m’est arrivé de croiser à plusieurs reprises les mêmes personnes dans les rues de Paris, des personnes que je ne connaissais pas. A force de les trouver sur mon chemin, leurs visages me devenaient familiers. Elles, je crois qu’elles m’ignoraient et que j’étais le seul à remarquer ces rencontres fortuites. Sinon, nous nous serions salués ou nous aurions engagé la conversation. Le plus troublant, c’est que je croisais souvent la même personne mais dans des quartiers différents et éloignés…

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Le théâtre. Vous ne savez pas ce que c’est?

Le théâtre. Vous ne savez pas ce que c’est?

LECHY ELBERNONComme c’est tranquille ! La mer est comme un journal qu’on a étalé, avec les lignes et les lettres. Et là-bas, au-dessus de cette langue de terre, on voit les grands navires passer comme des châteaux de toile. – Ma chère, nous parlions de vous. Est-ce que c’est vrai que vous n’avez jamais été au théâtre ? MARTHE Jamais. LECHY ELBERNON Ô ! Et que jamais vous n’étiez sortie de votre pays ? (Marthe fait un signe que oui.) Et voici qu’il vous a…

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Dans la crevasse

Dans la crevasse

Une légère brise parcourut la crevasse et je sentais sur mes joues un souffle glacial remonter des profondeurs. Une atmosphère étrange émanait de cette salle; les murs étaient animés d’un ballet de lueurs chatoyantes et d’ombres bleutées. À travers les reflets opalescents des parois de glace, quelques rochers lançaient leur éclat sombre et humide. Une mystérieuse menace hantait cet endroit, je sentais son haleine froide, et j’avais l’impression d’avoir pénétré dans un lieu sacré, un sanctuaire avec une formidable voûte…

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C’est un long voyage que ce voyage du chalet

C’est un long voyage que ce voyage du chalet

Ils montent, ils vont de nouveau à plat, ils montent; c’est un long voyage que ce voyage du chalet, à cause de toute la gorge qu’il fallait longer d’abord d’un bout à l’autre. On compte quatre heures pour la montée, en temps ordinaire, et deux pour la descente, en temps ordinaire, mais le commencement de mai n’était pas encore un temps très favorable et les quatre heures se trouvèrent largement dépassées. Pourtant on avait vu les sapins s’espacer enfin et…

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Vint un beau jour de l’arrière saison californienne…

Vint un beau jour de l’arrière saison californienne…

Vint un beau jour de l’arrière-saison californienne, chaud, langoureux, tout imprégné de la douce luminosité de l’été indien, sous un soleil voilé et une brise légère qui dérangeait à peine le calme de l’air tiédissant. Les lointains montagneux s’estompaient derrière d’imperceptibles rubans de brume violette et San Francisco disparaissait à l’horizon sous une enveloppe vaporeuse. La baie luisait comme une expansion de métal en fusion, prairie tranquille et scintillante hérissée de mâts, de haubans et de cheminées immobiles. Au loin…

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