Isaac ASIMOV: Cailloux dans le ciel

Isaac ASIMOV: Cailloux dans le ciel

Cailloux-dans-le-ciel.jpgA la suite d’une expérience scientifique qui a mal tourné, Joseph Schwartz, un modeste tailleur à la retraite originaire d’Europe centrale, est projeté dans le futur, à des dizaines de milliers d’années du XXème siècle, à une époque où l’humanité a fait sienne toute la galaxie. Dans ce nouvel ensemble géo-politique dominé par l’Empereur galactique et sa capitale, Trantor, la cité planétaire, la Terre n’est qu’une planète périphérique, obéissant à des coutumes arriérées et empêchée de se développer par la radio-activité qui, à part quelques poches, occupe la totalité de la surface planétaire. Mais les dirigeants de la Terre ont ourdi un plan qui menace l’ensemble des autres mondes. Réunis par les hasards de l’aventure, Joseph Schwartz, le Terrien primitif venu du passé, le physicien terrien Shekt et sa fille Pola, Bel Arvardan l’archéologue originaire de Sirius venu sur Terre pour prouver qu’ici se trouve le berceau véritable de l’humanité, vont être les acteurs principaux d’une histoire où se joue la survie de l’Empire…


Sous couvert d’un récit qui ne manque pas de naïveté dans la disposition des principales péripéties, auquel fait défaut en tout cas l’austère beauté de textes plus efficaces tels que les aventures de l’androïde Daneel et de l’inspecteur Elijah Baley, Isaac Asimov produit un roman à la fois divertissant et qui est une jolie réflexion sur les rapports humains. Le roman met en scène en effet une humanité parvenue au moment où elle a oublié son origine. L’idée d’une origine terrestre des hommes n’est plus qu’une légende terrienne, défendue par quelques extrémistes. La théorie répandue parmi les savants de l’Empire est celle au contraire d’un développement parallèle de l’homme sur différents mondes; pour eux, le développement des espèces doit conduire naturellement à ce stade de développement le plus poussé que serait l’humain. En s’opposant à cette doctrine au nom de l’idée d’une origine unique de l’homme, l’archéologue Arvardam, qui est l’un des personnages principaux du roman, nous offre le portrait d’un savant audacieux, habile à pourfendre des préjugés dont il peine lui-même à se libérer, parce qu’en même temps que savant il est aussi le fils de son temps.


On reconnaîtra sans difficultés dans cet aspect du roman une satire des théories sur l’homme qui, des prétendues hypothèses sur la supériorité de l’homme occidental jusqu’aux expériences totalitaires du milieu du XXème siècle, ont conduit la civilisation à la dérive. L’origine de Joseph Schwartz, venu d’Europe centrale, et son parcours, dans l’espace de la fiction, jusqu’à une Terre devenue le repoussoir des hommes sont autant de clins d’oeil aux réalités de l’Histoire. Teintées d’allusions à l’Antiquité ou à la Conquête de l’Ouest, l’incurie des administrateurs impérieux et la brutalité des troupes impériales complètent ce portrait d’une humanité qui, même du futur, nous fait cruellement penser à notre humanité présente.


Pour l’amateur d’Asimov, le roman est aussi un développement intéressant se situant entre les deux sommets de l’oeuvre que sont le cycle des Robots et celui de Fondation. Et une variation de plus sur le thème favori de l’écrivain: le poids des déterminations culturelles et sociales sur le regard que nous portons sur les autres, notre difficulté à appréhender l’humanité comme une totalité, même pour ceux qui engagent leur vie à lutter contre les préjugés qui séparent l’humain en des catégories étanches et limitent notre ambition de vivre.

 

3 réflexions sur « Isaac ASIMOV: Cailloux dans le ciel »

  1. Isaac Asimov est un auteur que j’affectionne beaucoup : j’aime la façon qu’il a de nous projeter totalement dans un autre monde qui ne nous est pas vraiment étranger car si bien décrit…
    Je viens d’ailleurs de publier mon avis sur “Fondation” le premier tome du “Cycle de Fondation” sur mon blog…

    Joli article, je reviendrais 😉
    Bonne continuation !!

  2. Merci pour ton billet, j’ai lu deux fois ce roman il y a déjà du temps, mais je suis fan d’Asimov et aime la façon dont il a relié ses différents romans pour en faire un tout cohérent.

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